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L’industrie automobile européenne fragilisée par les restrictions chinoises sur les terres rares

BySafiétou Barry

Juin 4, 2025

Certaines usines européennes de pièces détachées ont suspendu leur production et Mercedes-Benz envisage des stratégies pour éviter les pénuries de terres rares, alors que les inquiétudes grandissent face aux restrictions d’exportation décidées par la Chine sur ces minéraux essentiels.

En avril, Pékin a brusquement suspendu les exportations d’un large éventail de terres rares et d’aimants associés, perturbant ainsi les chaînes d’approvisionnement mondiales de secteurs clés comme l’automobile, l’aéronautique, les semi-conducteurs ou encore la défense.

Cette décision met en lumière la domination stratégique de la Chine sur le marché des minerais critiques, indispensables à la transition énergétique verte. Elle est aussi perçue comme un levier d’influence de Pékin dans la guerre commerciale qui l’oppose aux États-Unis. La Chine assure à elle seule environ 90 % de la production mondiale de terres rares.

Le commissaire européen au Commerce, Maros Sefcovic, a déclaré mercredi qu’il avait convenu avec son homologue chinois de clarifier rapidement la situation. Son collègue en charge de la stratégie industrielle, Stéphane Séjourné, a quant à lui affirmé : « Nous devons réduire notre dépendance à l’égard de tous les pays, en particulier ceux comme la Chine dont nous dépendons à plus de 100 %. »

Il a ajouté que ces restrictions renforçaient la volonté de diversification de l’Union européenne. Bruxelles a ainsi identifié 13 projets en dehors de l’UE visant à accroître l’approvisionnement en métaux et minéraux stratégiques.

De son côté, Joerg Burzer, responsable de la production chez Mercedes-Benz, a indiqué mercredi que des discussions étaient en cours avec les principaux fournisseurs du constructeur pour mettre en place des « tampons », notamment des stocks de terres rares, afin de se prémunir contre d’éventuelles interruptions. À ce stade, Mercedes n’est toutefois pas directement affecté par les pénuries.

BMW a de son côté confirmé que certaines parties de son réseau de fournisseurs ressentaient déjà les effets du manque, bien que ses propres usines fonctionnent normalement.

L’association européenne des fournisseurs automobiles, CLEPA, a pour sa part signalé que plusieurs chaînes de production ont dû être arrêtées, faute de matières premières. Elle a également précisé que, parmi les centaines de demandes de licences d’exportation déposées par les fournisseurs automobiles depuis début avril, seule une sur quatre avait été approuvée. Certaines ont même été refusées pour des raisons qualifiées de « purement procédurales ».

Sans nommer les entreprises concernées, CLEPA alerte sur la possibilité de nouvelles interruptions de production dans les semaines à venir.

Bien que l’annonce chinoise ait coïncidé avec d’autres mesures de rétorsion visant les droits de douane américains, ces restrictions s’appliquent à l’ensemble des partenaires commerciaux de la Chine et inquiètent désormais de nombreuses entreprises à travers le globe.

Des constructeurs allemands et américains ont exprimé leur mécontentement, estimant que ces mesures menacent leur capacité de production. Un fabricant indien de véhicules électriques avait lui aussi tiré la sonnette d’alarme récemment.

Face à cette situation, de nombreuses entreprises sollicitent l’intervention rapide de leurs gouvernements respectifs et tentent dans l’urgence de trouver d’autres sources d’approvisionnement.

Wolfgang Weber, directeur général de l’association allemande des industries électriques et numériques (ZVEI), a déclaré par courriel que certaines entreprises n’avaient de réserves que pour quelques semaines ou mois. « Actuellement, les entreprises se sentent abandonnées par les responsables politiques et, dans certains cas, cherchent elles-mêmes des solutions directement en Chine », a-t-il conclu.